mudra du grand Bouddha Amida de Kamakura

Le dix-huitième voeu d'Amida : le voeu primordial

deux personnes d'entraidant à gravir un roc dans le soleil couchant
Le dix-huitième voeu d'Amida mentionné dans le grand soutra de Vie-Infinie est d'une importance capitale pour les écoles de la Terre Pure et l'école du Jodo Shin ne fait pas exception à la règle. Pour rappel, en voici le texte :

"Si, moi devenu bouddha, tous les êtres vivants des dix quartiers ayant le coeur sincère, la foi sereine et le désir de renaître en mon pays vont jusqu'à penser à moi dix fois et n'y vont pas renaître, je ne veux pas la Parfaite Illumination. Seuls sont exclus ceux qui commettent les Cinq Rébellions et calomnient la Bonne Loi."


(Vous pouvez trouver les autres voeux ici)

En effet, ce court extrait contient des éléments particulièrement importants qui ont grandement contribué à définir ce qu'est devenu le bouddhisme dit "de la Terre Pure". Voyons ces éléments plus en détail :

"Si, moi devenu bouddha, [...], je ne veux pas la Parfaite Illumination."
Nous avons déjà parlé de cette formulation très caractéristique des voeux dans l'article traitant de la figure d'Amida, je ne m'y arrêterais donc pas.

"tous les êtres vivants des dix quartiers"
Ce détail (comme tous les autres) est d'une importance non négligeable. Il indique qu'Amida prend en compte tous les êtres vivants, quels qu'ils soient, d'où qu'ils viennent. La compassion d'Amida s'étend sur tout le monde, sans aucune distinction, ce qui signifie qu'il vient en aide même aux criminels, meurtriers, voleurs... Parfaitement conscient de la difficulté que représente la vie dans notre monde, il ne nous juge pas et secoure tous ceux qui font appel à lui. Le fait qu'Amida n'ait aucun scrupule à venir en aide même à des personnes ayant des comportements jugés inacceptables dans notre société peut parfois heurter. Cela ne veut pas dire qu'il cautionne ou encourage les comportements criminels ! Nous aurons l'occasion de discuter de ce point important dans un autre article : les enseignements de la Terre Pure ne sont absolument pas un prétexte pour mener une vie nuisible aux autres.

"ayant le coeur sincère, la foi sereine et le désir de renaître en mon pays"
"Le coeur sincère", "la foi sereine" et "le désir de renaître dans la Terre Pure" sont les trois conditions nécessaires à notre renaissance dans la Terre Pure. Ces trois conditions ont fait couler un peu d'encre... Voyons les unes par une:

- le coeur sincère désigne la sincérité du pratiquant, sa volonté réelle d'atteindre l'éveil et donc de renoncer aux actes mauvais pour bien sûr favoriser les actions bénéfiques, actions bénéfiques pour lui et pour les autres. Il est difficile de renoncer à nos mauvaises habitudes du jour au lendemain, c'est donc vraiment ici de la sincérité de l'intention dont on parle, plus que des actes en eux-mêmes.
- la foi sereine est un sentiment de certitude qui est d'une nature double : d'un côté il s'agit d'avoir conscience de notre incapacité à nous délivrer nous-mêmes en cette ère de Mappō, la fin du Dharma, de l'autre il s'agit de placer notre pleine confiance en Amida et sa capacité à nous sauver, malgré toutes nos faiblesses et nos incapacités.
- le désir de renaître dans la Terre Pure. Ici les choses sont assez claires, le Bouddha n'est pas là pour nous forcer la main : la volonté de renaître spécifiquement dans la Terre Pure de Sukhavati est bien évidemment un prérequis pour y naître effectivement.

Là aussi, vous vous en doutez, le point est suffisamment essentiel pour qu'on soit amenés à en reparler un peu plus tard.

"vont jusqu'à penser à moi dix fois et n'y vont pas renaître"
"penser à moi" consiste à penser au Bouddha Amida. Comment penser au Bouddha Amida ? La tradition nous indique deux méthodes privilégiées : la contemplation du Bouddha et la récitation de son nom (nembutsu). Un des soutras de la "trilogie de la terre pure", le soutra des contemplations de Vie-Infinie, enseigne une méthode élaborée qui consiste à visualiser la Terre Pure, le Bouddha Amida et ses deux assistants : Kannon et Seishi. L'autre méthode consiste à répéter la formule d'hommage dédiée : "Namu Amida Butsu". Bien que ces deux méthodes soient tout à fait consacrées par la tradition, une rapide lecture, même superficielle, du soutra des contemplations permet de constater la difficulté colossale que représente une telle pratique. Les méthodes de la Terre Pure se voulant avant tout accessible au plus grand nombre, aussi (et surtout) pour les personnes dépourvues de capacités, c'est bien sûr la méthode de la récitation du nembutsu qui est le plus souvent privilégié. A noter que bien sûr ces deux pratiques ne s'excluent pas mutuellement !

"Seuls sont exclus ceux qui commettent les Cinq Rébellions et calomnient la Bonne Loi."
Les Cinq Rébellions dont il est question ici sont:

- Tuer son père
- Tuer sa mère
- Tuer un arhat, un saint bouddhiste
- Blesser un Bouddha
- Provoquer un schisme dans le sangha, la communauté bouddhiste

Calomnier la Bonne Loi parle de soi-même. Toutes ces fautes sont particulièrement graves bien évidemment et qu'elles soient lourdes de conséquences est tout à fait entendable... Mais le message derrière cette phrase peut là aussi être interprété. ...comme nous le verrons plus tard (plein de choses à raconter plus tard, j'en ai bien conscience !)

Vous l'aurez compris, ce dix-huitième voeu est loin d'être anodin et c'est ce qui lui a valu le surnom de "Voeu primordial". Nous y reviendrons donc, mais dans une optique plus liée au Jodo Shinshu, notamment au travers des interprétations de Shinran Shonin, fondateur de cette école dont il va bientôt être temps de parler d'ailleurs !

Gratitude

Namu Amida Butsu
boutton de retour
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